Après une exposition personnelle à Bruxelles en 2017 et en 2022, ainsi qu’à Paris en 2019 et en 2021, Prune Nourry est de nouveau invitée par la galerie Templon à investir le grand espace de la rue du Grenier-Saint-Lazare à Paris du 11 janvier au 1er mars 2025. Dans la lignée de ses projets liés à la place de la femme dans la société à travers la symbolique de la matière terre, Terracotta Daughters (2011-2031), Mater Earth (2020-2023) et Statues Also Breathe (2022), l’artiste présente pour la première fois son projet Vénus.
Le projet Vénus est né d’une rencontre de Prune Nourry avec Ghada Hatem, gynécologue obstétricienne, fondatrice de la Maison des femmes de Saint-Denis, un centre d’aide et d’accompagnement pour les femmes victimes de violences. Rattachée à un hôpital, la Maison propose aux femmes en difficulté en Seine-Saint-Denis une prise en charge pluridisciplinaire. À travers leurs ateliers (alphabétisation, théâtre, danse…), l’artiste a rencontré huit femmes qui ont accepté de poser nues, en dépassant avec courage les tabous sociétaux liés à leur culture, ou ceux personnels liés à leurs traumas. Comme pour Projet Phenix en 2021, Prune Nourry renoue avec la tradition du portrait et a sculpté ici dans un contexte encore plus intime, entre une femme sculpteure et une femme modèle. À partir de leur histoire unique - chaque femme partageant si elle le souhaitait son parcours durant les séances de pose - et de leur forme de corps variés, l’artiste a modelé en terre leur buste à la manière des vénus préhistoriques. Leurs mots, autant que les détails de leur corps, inspirant chaque œuvre. Réalisé en taille humaine ou en petit format, le portrait a ensuite été moulé, puis tiré en bronze recouvert d’une peau de terre, ou tiré en terre cuite.
Forte de ses recherches et rencontres (dont Catherine Schwab, conservatrice en chef du patrimoine, chargée des collections du Paléolithique et du Mésolithique au musée d’Archéologie nationale de Saint-Germain-en-Laye, qui est originaire de Seine-Saint-Denis) autour des vénus du Paléolithique (période gravettienne) entamées fin 2022 pour la réalisation de son œuvre en tandem avec Kengo Kuma pour la gare de Saint-Denis - Pleyel, Prune Nourry a demandé aux femmes modèles de prendre les mêmes poses, debout et statique, que les vénus du passé.
Un lien fort entre le passé et le présent, entre le personnel et l’universel, opère dans ce projet ; ce thème fait partie des élans d’inspiration de la sculpteure, comme cela a pu être remarqué dans son exposition au Musée national des arts asiatiques - Guimet à Paris en 2017. Les mythes de création et la matière terre sont également au cœur du travail de Prune Nourry. En 2023, elle inaugure au Château La Coste l’installation permanente Mater Earth qui évoque la racine latine de « mère », de « maternité », mais aussi la matière (en anglais, « matter ») de l’argile. En parallèle, depuis 2022, elle travaille sur un projet collaboratif Statues Also Breathe, avec l’Université d’Ile-Ife au Nigéria, inspiré du mythe de création yoruba. Ce mythe oral, antérieur aux religions monothéistes écrites, raconte que l’humain a été créé à partir de l’argile d’Ife. À partir de 2011, elle développe aussi son projet Terracotta Daughters, une armée de petites filles réalisées en terre cuite à taille humaine enfouie dans un lieu secret en Chine jusqu’en 2030.
Cette exposition à la galerie Templon a été pensée en lien avec la commande Les Vénus dionysiennes pour le Grand Paris Express dans la gare Saint-Denis – Pleyel en tandem avec l’architecte Kengo Kuma, inaugurée en juin 2024. Cette commande, portée par la Société des grands projets, sous la direction artistique et culturelle de José-Manuel Gonçalvès avec le CENTQUATRE-PARIS et l’agence Eva Albarran & Co., sera installée en 2026. Pour s’ancrer à Saint-Denis avant cette date, Prune Nourry a décidé de déménager son atelier d’avril à juillet 2024, invitée par la Mairie de Saint-Denis pour une résidence artistique dans la Villa D., un ancien foyer pour jeunes filles et futur centre d’art. C’est là qu'elle a pu inviter les femmes pour des séances de pose, non loin de la Maison des Femmes. Dans l’espace de la galerie, Prune Nourry présente des sculptures qui font écho aux Vénus dionysiennes pour la gare Saint-Denis – Pleyel : une série de 8 petits bronzes avec une patine évoquant la terre, ainsi qu’un prototype de Vénus à l’échelle 1 (170 cm) pour rendre compte de la dimension monumentale de la future installation dans l’atrium de la gare.
Au sous-sol, l’artiste expose une installation composée de plus d’une trentaine de moules issus de l’Atelier de moulage du GrandPalaisRmn, à Saint-Denis, lieu de conservation du patrimoine, de métiers d’art uniques et véritable répertoire de l’histoire de la sculpture mondiale. Le film documentaire projeté rend compte de la relation entre l’artiste et ses modèles, et le processus de création ; il a été réalisé par Vincent Lorca (qui documente son travail : L’Amazone Érogène, Projet Phenix, Mater Earth, Statues Also Breathe) en association avec le collectif Femmes à la caméra.