Célèbre notamment pour son travail de directeur artistique pour le magazine Elle avec Gordon-Hélène Lazareff, Peter Knapp est un artiste pluridisciplinaire, à la fois photographe, graphiste, peintre, cinéaste et vidéaste. Du 10novembre au 15 décembre 2022, la galerie Maeght présente un ensemble inédit d’œuvres de l’artiste, mettant ainsi en lumière les multiples facettes du travail de Peter Knapp. Une exposition qui réhabilite la figure de l’homme à la fois artiste plasticien et photographe.
Peter Knapp n’en finit jamais d’observer ce qui l’entoure : les ciels unis où il relève de subtiles nuances de couleurs, les horizons marins, des paysages réduits à leur plus simple expression. Ce ne sont pas tant les nuances de couleurs qui l’intéressent dans ces paysages qu’une gamme de symboles. Peter Knapp reconnait ne pas être un grand coloriste ni rechercher l’esthétisme. Il recourt à un rythme inflexible de prise de vue : « Si je déclenche l’appareil méthodiquement, j’échappe à un choix esthétique personnel. » Les ciels de Peter Knapp présentent d’infimes différences de tonalité, s’offrent à diverses interprétations, voire certaines controverses. On y lit une expérience minimaliste. Ce minimalisme répond à une démarche singulière de l’artiste qui va en s’amplifiant. « Il y a un processus de simplification qui se met en marche et qui est vraisemblablement la base de ma méthode. J’ai une tendance innée à supprimer la perspective, le volume, dans chaque image. ». Ces suppressions radicales sont un rappel de son héritage du Bauhaus. En dépouillant le sujet à l’extrême - chaque ciel est regardé de façon frontale et fixé sans effet -, l’artiste touche à quelque chose de mystérieux : « J’ai l’impression qu’en photographiant un ciel, je garde quelque chose d’une réalité spécifique d’un jour, d’un moment, d’un bleu qui reflète le mystère (de l’infini). »
L’exposition consacrée à Peter Knapp par la galerie Maeght met en avant une photograhie plus radicale à partir des années 70 Les lignes occupent une place centrale dans les photographies de Peter Knapp, en particulier la diagonale – que l’on retrouve aussi bien dans des travaux de commande que dans ses recherches personnelles, tableaux et photographies. Dans ses séries, une ligne traverse l’espace du ciel dans des axes chaque fois différents, de l’horizontalité à la verticalité, sans oublier la diagonale. Ces images font dire à Pierre Restany que nous sommes en présence d’une création qui s’apparente au Sky Art, de la même manière que le Land Arta fait école. Peter Knapp aborde également l’horizon pour la symbolique : « Quand, dans un paysage, je fais la photographie du ciel et de la terre, j’y vois l’affrontement de la matière et de l’infini. ». Sur ce même thème, il différencie l’expérience photographique de celle de la peinture : « Le même paysage lorsqu’il est peint, le ciel et la terre ne font plus qu’un. C’est peinture contre peinture, alors qu’en photo, ça fait deux. ». Peter Knapp va continuer ses observations du ciel bleu et y scruter des signes : de nouveau des lignes et de la géométrie. Traces dont on sait qu’elles sont éphémères, la photographie permet de les retenir avant qu’elles se diluent et disparaissent.
Comme en réaction à ses projets conceptuels qui tendent parfois à déshumaniser son univers et dans lesquels les symboles rivalisent avec les motifs plastiques, Peter Knapp opère aussi un retour à l’homme. Une présence perceptible dans plusieurs travaux qu’il engage au cours des années 1980 : « J’ai un peu froid dans le ciel », déclare-t-il dans un entretien où, à la question : « À travers le signe, c’est l’homme que vous recherchez ? », il répond : « En cherchant l’homme, on commence à le voir ». On trouve partout des traces de l’homme, dans des formes qui évoquent sa silhouette ou son visage. L’anthropomorphisme a inspiré la démarche de beaucoup de photographes de la génération de Peter Knapp. Quant à lui, il découvre aussi bien des signes dans le monde végétal – meules de foin ou pieds de vigne -, que minéral - pierres posées sur le sol. Le regard du photographe active la ressemblance, la souligne. L’art de Peter Knapp, proche du ready-made, fait apparaître des formes humaines.