L'exposition « De la plume au ciseau » présente pour la première fois au public six lettres de Camille Claudel à son éditeur, Eugène Blot, qui viennent d’entrer dans les collections du musée de Nogent-sur-Seine. Elle se tient à l’occasion de la commémoration des quatre-vingts ans de la mort de l’artiste, le 19 octobre 1943.
Aux côtés des lettres à Blot, les prêts consentis par le musée Rodin et le musée d’Orsay permettent d’évoquer le réseau de critiques et de commanditaires qu’elle a su constituer pour soutenir la réalisation et la diffusion de ses œuvres : le critique Gustave Geffroy, l’industriel Maurice Fenaille ou encore le banquier Joanny Peytel. Des lettres à Florence Jeans et à Auguste Rodin évoquent le cercle intime de la jeune femme.
Dans sa correspondance, qui court ici de 1895 à 1909, Camille Claudel évoque ses projets en cours et les œuvres qu’elle s’apprête à exposer. On y découvre notamment ses hésitations à accepter la commande d’un monument à Auguste Blanqui (1805-1881), inclassable et irréductible révolutionnaire qui passa plus de 33 ans en prison pour ses idées, et les raisons pour lesquelles elle finit par y renoncer. On suit aussi les différentes étapes de l’édition en bronze de La Joueuse de flûte ou encore les détails de la fonte de L’Âge mûr pour Louis Tissier. La sculptrice s’ouvre enfin à Blot de sa détresse financière et, sans relâche, elle lui demande de l’argent, avec une franchise qui témoigne de la solide confiance qui la liait à son éditeur.
Ces lettres révèlent l’attention de l’artiste à tous les détails de la réalisation matérielle de ses sculptures, jusqu’à intervenir parfois directement dans la réalisation des bronzes. On découvre ainsi pourquoi la ciselure du Buste de Rodin est si particulière et pour quel contexte l’artiste a conçu Persée et la Gorgone. Placées aux côtés des œuvres qu’elles évoquent, les lettres nous éclairent sur leur genèse et les conditions de leur réalisation. Elles nous rappellent que, si les sculptures sont conçues dans l’esprit de leur créateur, leur réalisation dépend d’une commande et de la maîtrise par l’artiste de toute une chaîne de fabrication.