Du 2 février au 13 avril 2024, la Galerie XII Paris rassemble sept artistes contemporains, Alexandre Aldavert, Fabien Ducrot, Andrei Farcasanu, Didier Juteau, Sabatina Leccia, Charlotte Mano et Anne Pharel, autour des mots de Paul Valéry : « Il y a un instant où la nuit se fait voir à la lumière ». Dans ce dialogue photographique où il est question de matérialité plus que d'image, se croisent différents univers visuels avec comme leitmotiv l’obscurité de la nuit. Cette exposition collective propose une démarche qui deviendra récurrente pour la galerie : réunir des artistes invités et des artistes représentés par la Galerie XII pour un dialogue autour de la photographie contemporaine.
Si ces huit artistes ont en commun d'avoir choisi la photographie comme mode d'expression, ce n'est pas tant l'image qui les fascine que sa construction, sa présence physique et sa matérialité. Tous l’interprètent, l’utilisent, la dépassent pour la représenter. La recherche ne traite pas de l'image mais de sa capacité à se métamorphoser pour renaître sous une autre forme.
Fabien Ducrot traite le sujet par des images d’archives et l’intelligence artificielle. De photographies du XIXe siècle, générées et compilées par milliers, naissent des images empreintes d’une nouvelle matérialité. Car si l’IA façonne l’irréel et interroge la notion même d’image, Fabien Ducrot recourt à des procédés traditionnels de tirages au sel qui donnent une nouvelle texture aux images.
Charlotte Mano rédéfinit sans cesse matières et images à travers ses recherches sur l’intime en offrant à la fois une expérience hypersensible du médium et de son propre rapport au monde. Attirée par les supports étrangers à cet univers et attachée à expérimenter les limites de l’outil – la caméra – elle réalise des œuvres dans lesquelles images et textures sont indissociables. Naît ainsi une dimension nouvelle, sensible, un véritable engagement poétique.
La question de l’image-objet est aussi présente dans l’univers d'Anne Pharel, qui photographie les moments visuels impalpables dont les images témoignent pourtant de l’existence. Une interrogation quant à la matière sensible et à sa consistance à travers des œuvres planes ou en volumes.
Alexandre Aldavert et Sabatina Leccia envisagent eux aussi le tirage comme un matériau, que l’intervention manuelle ou la pensée intellectuelle viennent compléter. Il est une étape dans le processus créatif. Associé à l’écriture et à la poésie pour lui, à la perforation et à la broderie pour elle, le tirage disparaît en tant que tel. Il vit une métamorphose pour renaître sous une autre forme.
Par une approche plus classique de la photographie, le travail d’Andrei Farcasanu se déploie autour de l’intime par des œuvres en petits formats. Il interroge la notion de matérialité de l’œuvre par le savoir-faire technique. D’une même prise de vue, peuvent naître plusieurs images, chacune empreinte d’une matérialité différente selon les aléas de la chimie. Une recherche partagée par Didier Juteau dont les images dépossèdent celui qui regarde de ses certitudes visuelles tant photographie et matière se confondent.
La nuit, ses formes et sa présence physique, est envisagée par ces huit photographes selon différentes perspectives. Autant d’artistes à qui elle est essentielle pour dépouiller les images de leur sens initial et offrir ainsi à ceux qui la regardent de nouvelles réalités poétiques.