24/10  14/12/24
Wilfrid Almendra

Galerie Ceysson & Bénétière, New York

Vue in situ de l'exposition Wilfrid Almendra, galerie Ceysson & Bénétière, New-York, 2024 © Adam Reich, courtesy de la galerie Ceysson & Bénétière
Vue in situ de l'exposition Wilfrid Almendra, galerie Ceysson & Bénétière, New-York, 2024 © Adam Reich, courtesy de la galerie Ceysson & Bénétière

Avant de devenir artiste, Wilfrid Almendra étudia la mécanique et travailla comme chauffeur routier. L'artiste franco-portugais trouva de la beauté dans les friches industrielles, les jardins partagés et les nouveaux paysages autour des régions qu'il parcourait à travers l'Europe. Pour Wilfrid Almendra, ces endroits sont l'intersection entre la vie humaine et le monde naturel. Aujourd'hui, le travail de l'artiste se concentre sur ces carrefours, pour explorer les tentatives artificielles de l’homme pour maîtriser l'environnement et affirmer son dominion. C’est cette tension centrale que Wilfrid Almendra met en lumière dans l’exposition personnelle qu’il présente à la galerie Ceysson & Bénétière du 24 octobre au 14 décembre : à travers ses sculptures et ses installations, l'artiste propose des architectures de coexistence et de collision entre l'homme et l'environnement.

Almendra juxtapose souvent la sérénité tranquille du monde naturel et architecture moderniste épurée, mettant en scène un jeu poétique entre les structures érigées par l'homme et les formes spontanées crées par l'environnement. C'est le cas dans Labor day II — une sculpture en verre reflétant un paysage bucolique printanier. Pour cette œuvre, l’artiste a divisé une feuille de verre scintillante en trois panneaux coulés avec de l'aluminium, comme s’il s’agissait de fenêtres d'une maison immaculée. Des pennisetums jaunissants s'élancent depuis un champ d’une couleur marron tendre à la base de l'œuvre. Elles nous guident vers un débardeur blanc tâché, suspendu nonchalamment sur le verre — un geste parlant qui évoque l’ouvrier agricole fatigué, s'abandonnant à sa journée de repos. Au final, au milieu de cette scène pastorale luxuriante, Almendra incarne l'esprit du travailleur doté d’un sens aigu de l'équilibre. Il voit la terre non seulement comme un lieu de labeur, mais aussi comme de répit, dévoilant la grandeur. Mais dans des œuvres comme Model HomeSonata XXIII et Sonata XXVIII, les paysages sont représentés avec beaucoup plus de retenue. On y voit des barres d'acier noir, rappelant celles d’espaces domestiques clôturés, enfermer de délicieux vestiges de vie organique.

Dans la première œuvre, une seule fleur éclot derrière ces barreaux entourant un modeste verre cathédrale teinté de nuances roses et de bleues. Les bandes de couleurs vives, les textures contrastées et la précision des lignes s’assemblent en un tableau élégant, rappelant les compositions précises de l'abstraction minimaliste. Dans la seconde œuvre, la matérialité organique est encore davantage atténuée. Là, une fleur de pavot dans des tons sombre se décompose derrière du marbre, des carreaux, du verre et des barricades. À travers cette image austère de décomposition, Almendra porte un regard critique sur les infrastructures vieillissantesse détériorant en même temps que la matière biologique.

Dans cette exposition saisissante, Almendra explore à répétition le dialogue imprévisible entre les résidus de vie humaine et les empreintes environnementales. Ce faisant, l'artiste mène une réflexion sur les discours séculaires autour du pouvoir, en tant qu'ils concernent les hommes et les paysages qu'ils occupent. Mais Almendra ne désigne aucun vainqueur dans ce duel intemporel. L'artiste invite plutôt le public à se confronter à un amalgame d’associations captivantes — de petites scènes captivantes qui parlent de la tension à l’œuvre au sein de la connectivité interspécifique. En fin de compte, Almendra nous met au défi d'accepter cet inconfort existentiel tandis qu'il réfléchit aux conditions spatiales, matérielles et esthétiques donnant forme à la vie sur Terre.